Chaque pas dans le chemin de l’obéissance, ainsi que nous l’enseigne notre Ordre, mais aussi la Sainte religion chrétienne dont nous faisons profession, est accompagné de bénédictions réelles, parce que l’obéissance est le fruit de la foi, et que la foi nous associe avec le Grand Architecte de l’Univers, nous introduit dans une communion vivante avec L’Éternel.

Mais l’Éternel ne communique pas seulement au cherchant sincère une nature divine et ne le guide pas seulement par ses préceptes divins, il place encore devant lui, comme le rappellent les Instructions morales à nos différents grades, des espérances conformes à cette nouvelle nature qu’il revêt normalement le jour de son baptême, et qu’il va approfondir et perfectionner ensuite, en théorie du moins s’il est au sein de structures sérieuses, par son engagement initiatique.

De la sorte, si l’Éternel répond à la foi, il l’éprouve aussi. La foi a donc ses épreuves, et il ne faut pas s’imaginer que le cherchant n’ait à parcourir qu’une voix facile et paisible ; loin de là, au contraire, tous nos voyages symboliques en sont la parfaite illustration, il rencontre sans cesse des mers houleuses et un ciel orageux ; car l’Éternel a voulu qu’il fît ainsi une plus profonde et plus mûre expérience de ce que Dieu est pour le cœur qui se confie en Lui.

 

« L’Éternel a voulu qu’il fît ainsi une plus profonde et plus mûre expérience

de ce que Dieu est pour le cœur qui se confie en Lui.« 

 

Si le ciel était toujours serein, le sentier toujours tranquille, le cherchant ne connaîtrait pas aussi bien le Dieu auquel il a affaire; car nous savons combien le cœur est enclin à prendre la paix extérieure pour la paix de Dieu, à confondre la paix qui repose sur telle ou telle situation passagère, avec celle qui découle de la présence réelle de Jésus-Christ ! L’Éternel le sait ; c’est pourquoi, quand nous nous reposons sur les circonstances, au lieu de nous reposer sur Lui, il nous visite et, d’une manière ou d’une autre, il ébranle nos faux appuis par des événements qui nous surprennent et nous font sortir de notre sommeil trompeur, de notre « fausse paix ».

Il y a plus ; nous sommes souvent portés à croire que telle voie est droite, parce qu’elle est irénique, tiède, sans aspérité, douceâtre, exempte d’épreuves. C’est une grande erreur. Le sentier de l’obéissance est souvent tout ce qu’il y a de plus éprouvant pour la nature charnelle.

Ainsi Abraham fut non seulement appelé à rencontrer les Cananéens au lieu où Dieu lui avait dit aller, mais encore « il y eut une famine dans le pays » (Genèse 12, 10). Abraham devait-il en conclure qu’il n’était pas à sa place ? Non, car il aurait jugé alors « sur la vue de ses yeux », ce que ne fait jamais la véritable vue intérieure de la foi.

 

« En dépit de lui-même, le Tentateur mensonger et trompeur,

est l’instrument dont Dieu se sert,

lorsque nous nous confrontons à des critiques infondées et injustes,

des trahisons inattendues, des abandons surprenants, de rudes attaques,

pour rendre plus évidents encore les signes qui nous assurent

que nous œuvrons dans un juste esprit

et en conformité avec la Vérité de l’Évangile. »

 

Ce fut sans aucun doute une épreuve pour son cœur, quelque chose d’incompréhensible pour sa nature ; mais pour sa foi, tout était clair, presque aisé. De même, lorsque l’apôtre Paul fut appelé en Macédoine, la prison de son disciple Philippe fut presque la première chose qu’il rencontra comme lieu d’accueil. Un cœur, qui n’aurait pas été en communion avec l’Éternel, aurait vu, dans cette épreuve, un coup mortel porté à sa mission, une terrible désillusion face à ses prétentions.

Mais saint Paul fut rendu capable de « chanter les louanges de Dieu » au sein même de la prison, assuré qu’il était que toutes les choses qui lui arrivaient étaient telles qu’elles devaient être. Et Paul avait raison; car la prison de Philippe renfermait un vaisseau de miséricorde, une Arche secrète révélée aux misérables détenus qui, humainement parlant plutôt repoussants et détestables, n’auraient jamais entendu l’Évangile si ceux qui l’annonçaient n’eussent été jetés violemment dans le lieu même où ils se trouvaient.

De ce fait, en dépit de lui-même, le Tentateur mensonger et trompeur, fut l’instrument dont Dieu se servit pour faire parvenir l’Évangile aux oreilles de ses élus, comme il l’est encore, de nos jours, même si cela nous est éprouvant, lorsque nous nous confrontons à des critiques infondées et injustes, des trahisons inattendues, des doutes, des abandons surprenants, de rudes attaques, pour rendre plus évidents encore les signes qui nous assurent que nous œuvrons dans un juste esprit et en conformité avec la Vérité de l’Évangile.

« Mieux vaut souffrir dans la voie de l’Éternel,

que d’être à l’aise dans celle du Menteur. »

Abraham aurait dû se révolter et se mettre en colère à l’égard de la famine, comme Paul à l’égard de sa prison. Mais ils se trouvaient dans la position même où Dieu les avait placés, et ils ne reçurent aucun ordre d’en sortir.

La famine était là, il est vrai ; de plus, « l’Égypte » était à la portée d’Abraham, lui offrant une fallacieuse délivrance ; mais le sentier du serviteur de Dieu était ailleurs : et il vaut mieux mourir de faim en Canaan, s’il le faut, que de vivre dans l’abondance en Égypte.

Il vaut mieux, oui, souffrir dans la voie de l’Éternel, que d’être à l’aise dans celle du Menteur. Mieux vaut être pauvre avec le Christ, que riche sans lui. Abraham en Égypte aurait « eu du menu bétail et du gros bétail, et des ânes, et des serviteurs et des servantes, et des ânesses, et des chameaux », preuve évidente, dira la nature du vieil homme, qu’Abraham aurait bien fait de descendre en Égypte ; mais, hélas! il n’aurait trouvé en Égypte ni autel, ni réparation, ni réconciliation, ni sanctification, ni communion avec l’Éternel. Le pays de Pharaon n’était pas le lieu de la présence de l’Éternel, et Abraham en y descendant aurait perdu plus qu’il n’aurait gagné.

Il en est toujours de même pour nous puisque les mêmes lois se retrouvent à toutes les périodes de l’humanité ; rien ne saurait jamais tenir lieu de comparaison vis-à-vis de la communion avec l’Éternel.

La délivrance d’une calamité temporaire et l’acquisition des plus grands biens sont de pauvres équivalents de ce que l’on perd en s’éloignant, seulement d’un cheveu, du droit sentier de l’obéissance.

Sont-ils nombreux, ceux d’entre nous, qui peuvent ajouter leur amen à ces principes ?

Il est bon, de se poser honnêtement la question !

 

« Combien de fois avons-nous vu toutes ces magnifiques et saintes bénédictions

rapidement abandonnées, oubliées avec précipitation

pour des idées erronées, un peu d’orgueil blessé,

des principes faussés, des conceptions inexactes,

des vanités froissées, des susceptibilités heurtées ou encore des ambitions déçues,

pour tout dire des éléments humains parfaitement superficiels et futiles

au regard des principes sacrés ?« 

 

Combien n’y en a-t-il pas qui, pour échapper à l’épreuve et à l’exigence spirituelle, l’une et l’autre inséparables de la voie initiatique, se sont malheureusement détournés, pour suivre le courant des idées prétendument ouvertes, les séductions illusoires des certitudes d’hier, les brumes indistinctes des traditions dépassées depuis la venue de Jésus-Christ, et sont ainsi tombés dans un état de stérilité, de sécheresse, de tristesse, et pour certains de ténèbres spirituelles.

Il est possible qu’ils aient été, ou seront dans un proche futur, « bien traités » par Pharaon ; mais toutes ces choses peuvent-elles compenser la joie en Dieu, la communion avec le Ciel, un cœur vrai, une conscience pure, un esprit d’adoration, un témoignage vivant et un cheminement initiatique intérieur authentique ?

Et cependant combien de fois avons-nous vu toutes ces magnifiques et saintes bénédictions très rapidement abandonnées, oubliées à la hâte et avec précipitation pour des idées erronées, un peu d’orgueil blessé, des principes faussés, des conceptions inexactes, des vanités froissées, des susceptibilités heurtées ou encore des ambitions déçues, pour tout dire des éléments humains parfaitement superficiels et futiles au regard des principes sacrés que Jean-Baptiste Willermoz préserva au sein du Régime Écossais Rectifié ?

 

« Le chemin sur lequel nous place le Régime Écossais Rectifié,

est celui par lequel que nous pourrons mériter de porter véritablement

le titre béni et saint de « Chevalier de la Foi »

 

C’est pourquoi, en ces temps délicats, veillons contre cette malicieuse tendance à nous détourner du chemin de l’obéissance simple et complète ; chemin étroit, mais toujours sûr, quelquefois rude, mais toujours heureux et béni.

Soyons vigilants à garder « la foi et une bonne conscience », que rien ne saurait remplacer. Si l’épreuve survient, au lieu de nous détourner pour aller en Égypte, au sens d’une terre étrangère faussement plus accueillante et plus verte, attendons-nous ensemble à Dieu dans le silence et l’espérance.

Alors l’épreuve, au lieu d’être pour nous une occasion de chute, sera une occasion de montrer notre lien avec la Vérité. Et lorsque nous serons tentés de suivre le courant du monde, de nous laisser aller au désespoir ou à l’amertume, souvenons-nous de Celui qui lors de la fête de Pâque « s’est donné lui-même pour nos péchés, en sorte qu’il nous retirât du présent siècle mauvais, selon la volonté de notre Dieu et Père » comme l’écrit Paul dans son épître aux Galates (Gal.1, 4). Si tel a été son amour pour nous, et tel son jugement du caractère de ce présent siècle, au point qu’il se soit donné lui-même pour nous, afin de nous en délivrer, le renierons-nous en allant nous replonger, de nouveau, dans ce monde dont il nous a pour jamais délivrés par la puissance de la Croix ? À Dieu ne plaise !

Que le Dieu Tout-Puissant nous garde donc dans le creux de sa main et à l’ombre de ses ailes, jusqu’à ce que nous voyions le Divin Réparateur tel qu’il est, et que nous soyons comme Lui, et avec Lui pour toujours !

Tel est le chemin sûr sur lequel nous place le Régime Écossais Rectifié, pour que nous puissions mériter de porter véritablement le titre béni et saint de « Chevalier de la Foi » qui est notre véritable état, intime et permanent, devant l’Être éternel et infini, Lui qui est « la bonté, la justice et la vérité même qui, par sa parole toute puissante et invincible, a donné l’être à tout ce qui existe ».

 

Extraits de :« Discours du Respectable Député Maître

de la Régence Écossaise Dauphiné-Savoie »

Le Samedi 8 mars 2008