« MAGISTER AD EST, ET VOCAT TE »

« Le Seigneur est là, et il t’appelle » (Jean XI, 28)

 

Le Régime Rectifié, porteur et héritier d’une longue tradition, offre aux hommes, possédant une sincère noblesse de cœur mais cependant désorientés au sein de temps incrédules et corrompus, de participer à l’œuvre salutaire de réarmement spirituel et religieux, à la reconstruction des fondations du vrai Temple qui n’est point fait de mains d’homme, et accomplir, par là-même, l’impérieux devoir imposé à ceux qui ne peuvent accepter, ou qui souffrent, de croupir dans le marasme existentiel sans chercher à s’extraire de la ténébreuse geôle dans laquelle ils furent enfermés en venant en ce monde ; lieu terrible et inquiétant dominé par celui qui en est le prince, et qui, surtout, détient sur ces domaines périlleux la gloire et l’autorité (Luc IV, 6).

Il incarne cette société devant représenter une possibilité, pour « l’âme de désir », de s’agréger à un pieux regroupement, une organisation hiérarchisée et structurée, habitée par la juste connaissance des nécessités du temps et la parfaite conscience de l’indispensable travail de « sanctification » et de « réconciliation » qui est à réaliser pendant la courte vie qui nous a été donnée par la Providence Divine.

Elle appartiendra, dès lors, à un corps organique, solide et unifié, à une communauté spirituelle possédant une authentique foi lui conférant une rare et remarquable verticalité. Progressant ensuite dans le respect de ses devoirs, des impératifs que lui imposent son état, se revêtant de l’obéissance et se laissant lentement travailler par la « Parole » révélée, le Frère, communiant intérieurement au « Corps et au Sang » du Seigneur, acceptera, et consentira avec joie, à l’œuvre de transformation rédemptrice par le « lavage de régénération et le renouvellement de l’Esprit Saint, richement répandu sur nous par Jésus Christ, Notre Sauveur, afin que, ayant été justifiés par sa grâce nous devinssions héritiers selon l’espérance de la vie éternelle. » (Tite III, 5-6).

Ces promesses de l’espérance de la vie éternelle, que nous rappelle ce passage de l’Épître de Paul à Tite, chrétien d’origine grecque converti par l’apôtre des Gentils qui deviendra son compagnon de voyage, participent donc directement de l’aspiration propre du frère du Régime Rectifié, de chaque frère devenu capable de les appréhender comme une certitude qui accompagnera toutes ses actions et ses moindres pensées, puisqu’il posa, lors de son serment prononcé alors qu’il était plongé dans la nuit des sens, ses deux genoux à terre, sur le sol poussiéreux de cette vallée de larmes pour pouvoir y prier le Christ en Croix qui nous purifia et nous lava de nos péchés.

Le mystère de la Croix

La Croix du Christ est, en effet, puisque nous l’invoquons ici, l’unique levier de la « réintégration », elle en représente la perspective et l’accomplissement, le modèle et le Principe. C’est dans son « mystère » que se cache l’ensemble de la doctrine du Régime Rectifié, mais aussi l’intégralité de la Toute Puissance du Verbe de Dieu.

Elle réincorpore, à la fois l’origine primitive et la destination, le premier Adam et le second, dans une unité symbolique, une unité retrouvée, achevant et dissolvant définitivement, par l’effet de sa force salvatrice, les fers de la manifestation qui nous tiennent enchaînés dans cet univers dégradé, fers qui seront d’ailleurs amenés à disparaître lorsque la fin des temps surviendra, puisqu’ils ne possèdent aucune véritable réalité, aucune consistance ontologique propre.

Or, pour rendre ce culte et le rétablir dans le Temple, pour allumé sur l’autel des holocaustes un Feu Nouveau, pour élever des parfums précieux vers l’Éternel, pour invoquer son Nom et célébrer sa Gloire, il s’agit, après avoir éprouvé et subi les douloureuses et éprouvantes marques de la purification, de « faire place à l’Esprit », de s’abandonner au secret et indicible pouvoir du Ciel, d’être sensible au souffle du Seigneur conféré aux élus du Très Haut, symbolisant la pleine réalité de la « Présence » dans la secrète chambre du cœur.

C’est pourquoi Willermoz écrira, dans sa grande sagesse, et sa profonde compréhension des vérités divines, lui qui avait clairement entrevu que « le seul but de l’initiation est de faire remonter du Porche au Sanctuaire », et qui mit tout en œuvre, par pure charité et infatigable vocation, pour que soit proposée une effective « voie » de rétablissement aux enfants égarés par les illusions du siècle et les ruses de l’adversaire aspirant, de tout leur être, et du fond d’eux-mêmes, à retrouver le chemin du Royaume : « Ce signe [c.a.d. la Présence du Seigneur] est la clé de toute la science. Il est l’accomplissement de toutes les figures que nous représente la Loi d’Alliance ou de Promesse. Il les explique toutes. Il nous figure cette colonne de nuée lumineuse qui marchait guidée par l’ange du Seigneur devant le camp des israélites pour les conduire dans la Terre promise. [1]»

Note.

[1] J.-B. Willermoz, Le Traité des deux Natures, Fonds Willermoz, MS 5940 n°5, Bibliothèque de Lyon.